LE BATEAU

Musique douce . Il me fallait ça . Agréable chaleur venant du radiateur . Admirables fleurs  .
Trop d’événements se sont précipités dans ma vie . Il y a peu , tout était normal , tout allait bien. Mais aujourd'hui ...
Me levant péniblement , je saisi mon carnet ... Effleurant les pages , je me retrouve alors sur la dernière page , celle de ce fameux jour . Compte rendu habituel du petit train train . ils vont être surpris avec ce que je vais écrire aujourd'hui  , si j'ai la force pour le terminer et si ils ne reviennent pas avec leurs seringues .
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Comme tous les jours , des mon réveil je montais en haut du "navire" pour y vérifier les circuits électriques . Avec le temps qu'il faisait en cette saison , il arrivait bien souvent que l’équipement anachronique de la "loupiote" se déréglait ou tout simplement s’arrêtait de fonctionner . C’était la mon travail , réparer inlassablement la machinerie . Atroce engin qui se repaissait de ma transpiration . Combien d'heures de ma triste vie avais je passe sur cet horrible amas de fer rouillé et de fils électriques ?
Et ce fut sans surprise que je vit la "loupiote" éteinte . La tempête avait fait rage hier soir et , sans doute , de l'eau s’était infiltre par le toit , si on peut appeler cela un toit . Je m'escrimais donc a trouver ou était le problème , les pieds dans des pantoufles qui commençaient a se remplir d'eau . La lampe n'avait pas grille . Les circuits principaux étaient intacts , mouilles mais intacts . Au bout d'une dizaine de minutes , ayant cherche en vain la panne , je me résolu a aller prendre un bon café en bas avant de poursuivre mon travail . "De toute manière , avec ce temps la , y' viendront par dan' l coin "marmonnais je dans ma barbe . Je dégustais donc tranquillement mon café dans mon "antre" et , une petite demi heure plus tard je remontais en haut de mon "château" après m’être habillé .
Dehors , il faisait si sombre que l'on se serait cru en pleine nuit . pourtant , il était plus de dix heures du matin . le vent soufflait très fort et j'entendais mon "château" qui grinçait , qui hurlait presque a chaque rafale .
Je trouvais alors la panne . Elle provenait d'un fil qui , certainement , avait chauffe au point de se consumer . Il me faudra installer un autre fil de rechange et ce sera bon . Mais , en inspectant d'un peu plus près le fil a la lumière de ma torche électrique , je vis qu'il avait du déclencher un petit incendie qui avait du mourir très rapidement grâce a l’humidité environnante . Mais le problème , c'est que le fil en question rentrait dans ce que j'appelait la "boite noire" .
Cette boite noire n'est en fait que le système de régulation électrique mais , sa couleur , son apparence (en acier doux ) en faisait un objet mystérieux , d'autant plus qu'il était impossible de la démonter puisque la boite avait été soudée pour je ne sais quelle raison . J’espérais que le feu ne s’était pas propage a l’intérieur par le petit orifice dans lequel rentrait le fil car j'aurais été dans l’impossibilité de réparer , faute de pièces de rechange et de matériel adéquat . Et il faudrait attendre le prochain ravitaillement pour avoir une pièce de rechange , soit deux mois ... La radio ! Oui , bien sur ! Je descendais l'escalier a toute vitesse , heureux d'avoir enfin quelque chose hors du commun a faire aujourd'hui . Mes pieds me propulsaient a une vitesse incroyable dans l'escalier , vitesse que je ne croyais pas pouvoir atteindre , mais , cela valait bien la peine , pour un peu de changement . Malheureusement je crois bien que j'ai du glisser dans l'escalier . Qui ou quoi en est responsable , mon empressement , mes pantoufles ou bien le sol détrempé ? Un peu des trois certainement ...
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Au réveil tout allait bien . Lorsque j’émergeais , j' étais heureux d’être en vie plus qu'autre chose . La douleur se réveilla avec un temps de retard . En plus d'un mal de tête  , je ressentait une horrible douleur a la jambe gauche . J'avais l'impression qu'un troupeaux de mammouths arrivés d'on ne sait ou avait piétinés , chacun a leur tour ma pauvre jambe . Quant a ma tête , je suppose qu'elle avait du heurter une marche dans ma chute . Apres avoir déchiré le bas du pantalon , je regardais ma jambe . Spectacle horrible . De mon mollet , j'avait enfanté deux amas rouges et blancs qui répandaient a tout va du sang . Ma jambe avait une posture étrange et je me rendis compte que son sens était inverse , elle avait l'air de se plier dans le mauvais sens .J'avais du me briser le genoux . De plus , le tibia et le péroné , brises a près leur moitié , sortaient de ma jambe comme s'ils voulaient s'en échapper . Mon sang recouvrait  le sol . Je ne sais vraiment pas combien de temps j' étais reste inconscient mais , au vu de la quantité , j'avais du perdre un bon litre de mon essence vitale .

Tâtant ma tête , j'y découvrais une énorme bosse et du sang séché . Pas trop grave , compare a la jambe . Il fallait faire quelque chose , car sinon , j'allait y rester , me vidant peu a peu de mon sang .

Inutile d'essayer de me lever , de toute manière , je n'en aurais pas la force . Je me décidais donc a ramper vers la salle de bain ou se trouvait ma trousse d'urgence . Que faire , si ce n'est appeler les secours ... Encore faudrait il que j'arrive jusqu’à la radio .

J'avais l'impression que des centaines de kilomètres séparaient le bas de l'escalier de la salle de bain . Pourtant , un jour que je m'ennuyait , je m'etait amuse a tout mesurer et la , je crois m'en rappeler , il y avait quatre mètres et soixante centimètres . Centimètres par centimètres , retenant des hurlements de douleur , qui de toute manière n'auraient servi a rien , j'avançait jusqu'a la salle de bain . Ma jambe ne répondait plus du tout a mes sollicitations . J'entendais même l'os crisser sur le sol . La vibration remontait tout le long de mon corps et j'essayait d'oublier que c'etait moi qui faisait ce bruit .

Au bout de deux mètres , je m'accordais une pause tellement la douleur etait insoutenable . Regardant derrière moi , je vis une traînée rougeâtre : mon sang . Je puisait dans une poche de mon pantalon mon paquet de cigarettes . Machinalement , j'en mettait une a la bouche en essayant de faire un garrot au niveau de la cuisse avec un morceau de pantalon . Cette cigarette avait un goût bizarre, décidément rien n'allait bien aujourd'hui . Sortant mon zippo de ma poche je vit alors qu'il avait prit une teinte rougeâtre . Du sang ! Crachant alors la cigarette que j'avais a la bouche , je put me rendre compte que elle aussi avait prit cette teinte funeste .Elle etait littéralement imprégnée de sang et j'eu beau faire de vider le paquet devant moi , toutes etaient aussi rouges qu'une cerise en plein ete .

Abrégeant alors ma pause , je me remis a ramper .

Combien de temps s'etait écoulé depuis mon éveil . une heure , deux ? le fait est que j'arrivais enfin dans la salle de bain et , par miracle , le balais miteux qui me servait a faire le ménage une fois par mois etait la . l'empoignant , je me mis a ouvrir délicatement la porte de la pharmacie et a faire basculer tout ce qui se trouvait a l'intérieur au sol . Quelques flacons se brisèrent mais peu importe . Je pris alors tout le temps de désinfecter la plaie , d'y appliquer un bandage et me faire un garrot . Mieux encore , avec le sparadrap , quelques bandes et le balais , je réussit a me faire , en quelque sorte , une jambe artificielle sans articulations . M'accrochant a l'évier , je put enfin me relever . Quelle allure devais avoir . J'en profitais pour regarder dans la glace si ma blessure a la tête n'etait pas trop grave . Une grosse bosse mais pas de plaie béante , c'etait déjà ça .

La deuxième étape etait de rejoindre le poste radio dans la pièce d'a cote . Je parvenais non sans peine a m'y rendre et je put m'asseoir sur une chaise . Déployant mes dernières forces , j'allumais la radio et je lançais " pascal II .... Pascal II ... S.O.S. ... Urgent ...
Envoyez secours ... Ici Pascal II ... Demande secours d'urgence ...."
et je continuais ainsi durant vingt bonne minutes sur une dizaine de fréquences différentes sans jamais obtenir de réponse . Saloperie de tempête . Impossible de communiquer avec l'extérieur . J'allais y rester , c'etait sur ...
C'est alors que j'entendis une corne de brume . Je pensais tout d'abord que mon imagination me faisait des tours et que je VOULAIS entendre une corne de brume mais quelle ne fut pas ma surprise lorsque j'entendis cette même corne de brume une deuxième fois . je retenais ma respiration , me concentrant sur mon ouie , espérant entendre cette corne de brume une troisième fois . Lorsque cela arriva je ne put retenir un cri de joie . Quelqu'un avait entendu mon message et venait a mon secours .
Mais , tout en essayant de monter au "château" , je me dis qu'il etait trop tôt pour que ce soit des secours , cela devait être un navire qui etait la par hasard . Sacré providence !
Plus je montais les marches et plus je m'inquiétais . Mais un navire dans ce secteur risque beaucoup sans ma "lupiote" . Avec tous les récifs , il a de forte chance de sombrer , surtout avec une telle tempête . Mais que faire , si ce n'est espérer .
Arrive en haut , je priais pour que le bateau ne s'échoue pas ou ne coule pas mais je priais aussi pour qu'il vienne ici . Mais comment pourrait il venir ici alors que l'on n'y voyait pas a cinquante mètres . J'entendais toujours la corne de brume mais je ne voyais pas les lumières du navire . Peut être allait il passer au large . Je me posais alors une question , pourquoi n'avaient ils pas répondu a la radio . Bien qu'il y ait une tempête , ils devaient être suffisamment proche pour m'entendre et pour me répondre . Donc , logiquement , cette corne de brume etait pour moi.
Le vent etait si fort et changeait si souvent de directions que je ne pouvais déterminer d'ou venait le son de la corne de brume . Dame nature n'etait pas clémente aujourd'hui et j'espérait que le capitaine de ce navire etait un vieux loup de mer qui saurait nous sortir de cette situation délicate .
En tout cas , s'il arrivait a trouver le chenal sans l'aide de la "lupiote" , je lui en serait redevable a vie , a ce capitaine  , si je ne trouvais pas la mort avant .
La mer etait déchaînée , les vagues montaient jusqu'en haut du château , ou etait ce la pluie qui arrivait par paquet ?
La corne de brume se faisait toujours entendre , a intervalles réguliers ..

Et d'un coup , surgissant de la noirceur du ciel et de la mer une ombre apparut . Et ce n'etait pas une petit ombre ! Un navire d'au moins quarante mètres de large arrivait sur le château . Il etait a moins de cent mètres de moi et arrivait très vite , trop vite a mon goût .
Aucune lumière , aucun projecteur , les inconscients !

Il allait percuter le château , mon château ! Oubliant la douleur , je descendais l'escalier et me saisit d'une grosse lampe torche . Enfilant ma parka je sortait et envoyais des signaux lumineux au navire . Mais , j'avais beau faire , il ne ralentissait pas pour autant et se trouvait maintenant a moins de cinquante mètres .
Mon dieu ! C'est un porte avions ! Que faisait il ici ?
Complètement paralyse , j'avais l'impression que le temps s'etait arrêté . Le navire etait la , immense , froid , se frayant un chemin a travers une mer en folie a toute vitesse et mon château semblait trembler a la vue de cette masse de métal qui surgissait d'on ne sait ou pour venir se fracasser contre son flanc .
Puis le temps repris ses droits . Mon seul réflexe fut de me jeter au sol , sur les paves détrempés de la jetée . Le vent semblait pousser ce navire pour qu'il aille encore plus vite et tout d'un coup ce fut le choc . Métal hurlant contre la pierre , poutres de bois qui criaient leur agonie , verre qui éclatait de douleur .
Des millions de bruits se firent entendre en même temps et j'avais l'impression de tous les entendre distinctement . Un bruit plus sourd y fit place , c'etait mon château qui s'écroulait sous la poussée formidable du navire de guerre . Celui ci avait même envahi l'îlot . Des dizaines d'objets et morceaux d'objets retombaient en pluie tout autour de moi . Et , après ce cataclysme qui semblait avoir dure des ères entières , le calme revint  . Un calme époustouflant , même le vent et la pluie s'etaient arrêtés , comme s'ils avaient juste voulut cela .
Mon château ne ressemblait plus a rien . Il avait été décapité a environ deux mètres du sol , et , la coque du porte avion lui faisait désormais office de toit . Le plus étrange c'est qu'il n'y avait aucune activité a bord du navire . Comme si rien ne s'etait passe , personne n'en sortait , ou du moins je le pensais , car je ne pouvais bien évidement pas voir le pont .

J'attendais donc qu'ils daignent bouger pour appeler . Mais je dut me rendre a l'évidence , ou il n'y avait personne a bord ou ils ne tenaient pas du tout a me rencontrer . Mais il y avait forcement quelqu'un a bord pour activer les machines et , surtout , la corne de brume .
Je me relevais donc , impatient de rencontrer mes sauveteurs qui avaient sacrifies leur navire pour moi . Mais personne ne venait , il n'y avait pas plus de signe de vie a bord que dans un cimetière . Un frisson me parcouru alors . Cherchant le nom du navire sur la proue , je ne découvrit qu'un chiffre . Ce qui m'étonna le plus , c'est de voir des algues colles sur la coque et le métal entièrement rouille . De plus , il semblait être de conception assez ancienne . Il ressemblait en fait a la coque d'un cargo sur laquelle on aurait placé une piste d'atterrissage avec les superstructures placées sur le cote droit .
Un second frisson me parcouru la nuque lorsque je vit le trou béant dans la coque . il devait faire au moins quatre mètre de circonférence et etait sous la ligne de flottaison . Cela devait être l'impact d'une torpille et peut être l'équipage avait il abandonne le navire ? Dans quel cas cet îlot l'aurait sauve des eaux profondes de l'atlantique . Je ne parvenais pas a voir le pavillon du navire malgré ma lampe torche . Mais une minute ! L'équipage n'avait pas pu abandonner le navire puisque les moteurs etaient en marche lors de la collision ,du moins je le croie vu sa vitesse , et de plus j'avais entendu la corne de brume .
Comme le trou dans la coque etait au niveau accessible depuis mon îlot , je décidais d'y rentrer et d'essayer de trouver quelqu'un a bord pour m'aider .
Je me retrouvais dans ce qui avait du être une salle des machines . Je retrouvais ça et la quelques squelettes humains . Je n'arrivais pas a y croire . De plus , les parois intérieures etaient recouvertes d'algues et je retrouvait même trois poissons encore vivants qui se débattaient dans les quelques flaques qui restaient . A force d'effort et a l'aide d'une barre de métal , je parvint a ouvrir une porte qui etait complètement rouillée . Je m'engageais alors dans les corridors du navire en oubliant même la douleur.
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Pas un vivant a bord , ou alors il se cachait bien . Par contre , on trouvait de l'eau partout mais ça , j'en avais l'habitude .
Un rapide examen du pont me surpris . J'y trouvais d'énormes trous , causés très certainement par des bombes . Les superstructures etaient truffes de balles et regorgeaient , comme le reste du navire d'eau et d'algues . Dans les hangars , je trouvais même un avion et quelle ne fut pas ma surprise de découvrir un avion a hélice . Je pensais que l'aéronavale n'utilisait plus que des avions a réaction comme on en voit dans les films . Celui la ne datait pas d'hier . Sa carlingue etait en métal mais il semblait si vieux ... il y avait même un cadavre ou plutôt un squelette a bord .
Las de ces macabres découvertes je décidais d'aller me reposer un peu dans ce qu'il restait de mon château avant de continuer mes recherches . Apres avoir un peu mange , j'ai du m'endormir .

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Lorsque je me suis réveillé , j'avais change d'endroit . J'etais dans une chambre , le soleil brillait au dehors et le murs etaient blancs . Pas une trace d'humidité . Je n'avais même plus mal a la jambe .
Lorsque je vit un docteur , je lui demandais de remercier le capitaine du navire qui m'avait sauve et il me dit alors que j'avais été récupéré par hélicoptère .
Il me dit aussi que j'avais déliré pendant quatre jour a propos d'un porte avion , de cadavres et d'algues .
Il me dit enfin que c'etait certainement du au choc , lorsque le phare s'etait écroulé sur moi.
Lorsque je rencontrais , bien plus tard , mon sauveteur , il me confirma l'histoire du docteur et me jura sur l'honneur que pas même une barque n'avait accoste sur l'île .
Voila , ma petite histoire est achevée . Ai je rêvé ? Les docteurs sont très gentils la ou je suis actuellement . Ce qui me gêne un peu , c'est l'espèce de vêtement blanc qu'ils me mettent quand j'ai une crise ... Vous comprenez ... Avec ça , c'est pas facile d'écrire ...